Urticaire chronique en dermatologie à Lomé : étude de 129 cas

[Chronic urticaria in dermatology in Lomé: Study of 129 cases]

Julienne Noude Teclessou1, Koufouyema Atsou1, Koussaké Kombate1, Piham Gnossike1, Abla Séfako Akakpo1, Abas Mouhari-Toure1, Bayaki Saka1, Palokinam Pitche1

1Department of Dermatology and Venerology, Teaching Hospital of Lomé, Lomé, Togo, 2Department of Dermatology and Venerology, Centre de Dermatologie de Gbossimé, Lomé, Togo, 3Department of Dermatology-Venerology CHU Sylvanus Olympio, Lomé. Faculty of Health Sciences, Lomé University, Lomé, Togo, 4Department of Dermatology-Venerology CHU Kara, Faculty of Health Sciences, Kara University, Kara, Togo

Corresponding author: Julienne Noude Teclessou, MD


Submission: 31.12.2020; Acceptance: 11.01.2021

DOI: 10.7241/ourd.2021s1.1

Cite this article: Teclessou JN, Atsou K, Kombate K, Gnossike P, Akakpo AS, Mouhari-Toure A, Saka B, Pitche P. Urticaire chronique en dermatologie à Lomé : étude de 129 cas [Chronic urticaria in dermatology in Lomé: Study of 129 cases]. 2021;12(Supp. 1):1-5.

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ABSTRACT

Objective: The aim of this study was to document the epidemiological, clinical, therapeutic and progressive profile of chronic urticaria in dermatology in Lomé (Togo).

Patients and Method: We carried out a prospective study in the three public dermatology departments of Lomé from November 2017 to April 2019. All patients with chronic urticaria diagnostic were included.

Results: In total, 129 (1.1%) of the 11,355 patients seen during the study period had chronic urticaria. The mean age of the patients was 34.5 ± 13 years and the sex ratio (M / F) was 0.49. A history of personal (65.1%) or familial (47.6%) atopy was found. Typical fleeting edematous papular lesions were present in 100% of patients and angioedema in 52 (40.3%) patients. Treatment was based on antihistamines antis H1 (100% of patients); mainly second generation (86% of patients). Remission was noted in 69.9% of patients.

Conclusion: Chronic urticaria is a rare pathology in dermatological consultation in Lomé. The superficial forms are the most observed.

Key words: Chronic urticaria; Dermatology; Lome


RÉSUMÉ

Objectif: Le but de cette étude était de documenter le profil épidémiologique, clinique, thérapeutique et évolutif de l‘urticaire chronique en dermatologie à Lomé (Togo).

Patients et Méthode: Nous avons réalisé une étude prospective dans les trois services de dermatologie publique de Lomé de novembre 2017 à avril 2019. Tous les patients chez qui le diagnostic d‘urticaire chronique a été retenu ont été inclus.

Résultats: au total, 129 (1,1%) des 11355 patients vus durant la période d‘étude, avait une urticaire chronique. L‘âge moyen des patients était de 34,5±13 ans et le sex-ratio (M/F) de 0,49. Un antécédent d‘atopie personnelle (65,1%) ou familiale (47,6%) était retrouvé. Les lésions typiques papuleuses oedémateuses, fugaces étaient présentes chez 100% des patients et l‘angio-oedème chez 52 (40,3%). Le traitement était basé sur les antihistaminiques antis H1 (100% des patients) ; principalement de deuxième génération (86%). Une rémission était notée chez 69,9% des patients.

Conclusion: L‘urticaire chronique est une pathologie rare en consultation dermatologique à Lomé. Les formes superficielles sont les plus observées.

Mots clé: Urticaire chronique; Dermatologie; Lomé


INTRODUCTION

L’urticaire est un syndrome cutanéo-muqueux inflammatoire très fréquent, caractérisé par des éruptions papuleuses érythémateuses prurigineuses et fugaces [1]. L’urticaire constitue un motif de consultation fréquent en dermatologie et peut affecter jusqu’à 20% de la population générale [2]. Le diagnostic positif de l’urticaire est clinique [3,4]. Il s’agit d’une affection dont les causes sont multiples et variées [58]. L’urticaire peut être aigue ou chronique. L’urticaire est dite chronique lorsqu’elle se manifeste par des lésions récidivantes ou apparaissant de manière permanente pendant plus de six semaines. La prévalence ponctuelle de l’urticaire chronique serait de 0,5 à 1 % [9]. En France, l’incidence exacte de l’urticaire chronique n’est pas connue mais elle est évaluée entre 0,1 et 0,5 % dans la population générale [10,11]. Peu d’étude ont porté sur les urticaires chroniques en Afrique. La prévalence de l’urticaire chronique est estimée entre 15% et 20% de la population générale en Algérie [12]. Le profil épidémio-clinique de l’urticaire chronique n’est pas connu en Afrique noire.

Le but de notre étude était de documenter le profil épidémiologique, clinique, thérapeutique et évolutif de l’urticaire chronique en consultation dermatologique à Lomé.

PATIENTS ET MÉTHODES

Il s’est agi d’une étude prospective qui s’est déroulée pendant une période de 18 mois (Novembre 2017 à Avril 2019) dans les services publics de dermatologie des Centres Hospitaliers Universitaires (CHU) Sylvanus Olympio, CHU campus et le centre de Dermatologie de Gbossimé à Lomé. Tous les patients vus en consultation dermatologique dans l’un des centres d’étude chez qui le diagnostic d’urticaire chronique a été retenu ont été inclus. Le diagnostic de l’urticaire était clinique. Les urticaires aigues (évoluant depuis moins de 6 semaines) et les mastocytoses n’ont pas été inclus dans notre étude.

La collecte des données a été faite à l’aide d’une fiche d’enquête préétablie, remplie par un dermatologue; comportant les variables suivantes :

  1. – Les donnés sociodémographiques : âge, sexe
  2. – Les aspects cliniques : antécédents personnels et familiaux, durée d’évolution de la maladie, types et sièges des lésions.
  3. – Les aspects thérapeutiques et évolutifs

Les données recueillies ont été saisies et analysées par le logiciel épi info 7.2.

Ethics Statement

Le consentement éclairé des patients était obtenu et leur participation était libre.

RÉSULTATS

Sur un total de 11355 patients vus durant la période d’étude, 129 cas d’urticaire chronique ont été pris en charge. La prévalence de l’urticaire chronique était de 1,1%. L’âge moyen des patients était de 34,5±13 ans avec des extrêmes de 6 ans à 76 ans. Quarante-quatre (34,1%) patients étaient âgés de 20 à 30 ans et 36 (29,9%) de 30 à 40 ans. Seul 4 (3,1%) patients étaient âgés de moins de 15 ans et 6 (4,7%) âgés de plus de 60 ans. Parmi les 129 patients ayant une urticaire chronique, 87 (67%) était de sexe féminin ; le sex- ratio (M/F) était de 0,49.

Quatre-vingt-quatre (65,1%) patients avaient des antécédents personnels d’atopie dont principalement, la rhinite allergique (40 soit 47,6%) et la conjonctivite allergique (37 soit 44%). Un antécédent familial d’atopie était retrouvé chez 50 (38,8%) patients notamment l’asthme 26 (52,0%) et la rhinite allergique 21 (42,0%) (Tableau I). La durée moyenne d’évolution de l’urticaire chronique avant la consultation était de 16,8±32 mois, avec des extrêmes allant de 2 mois à 20 ans.

Tableau 1: Aspects épidémiologiques et cliniques de l‘urticaire chronique.

Sur le plan clinique, tous (100%) les patients avaient présenté des papules érythémato-œdémateuses, fugaces, migratrices et prurigineuses (Fig. 1). L’angio-œdème était retrouvé chez 52 (40,3%) patients, seul ou en association avec les lésions cutanées (Tableau 1). Les lésions prédominaient aux membres (122 soit 94,6%) et au tronc (120 soit 93%) (Tableau 1). L’examen physique permettait de noter un dermographisme chez 10 (7,8%) patients. Seul 3 patients (2,3%) avaient signalé la survenue de troubles respiratoires au moment des poussées urticariennes. Une arthralgie était notée chez 2 (1,5%) patients.

Figure 1: Lésions papuleuses érythémateuses œdémateuses au cours de l’urticaire chronique.

Les antihistaminiques antis H1 étaient utilisés chez tous (100%) les patients. Les antihistaminiques de deuxième génération (111 soit 86%) étaient majoritairement prescrits. Ces antihistaminiques étaient utilisés seul, ou en association avec les corticoïdes injectables chez 8 (6,2%) patients, présentant un angio-œdème au moment de la consultation dermatologique. Seul 17 (13,2%) patients avaient nécessité des doses élevées d’antihistaminiques allant de deux à quatre comprimés de desloratadine.

Six (4,7%) patients étaient perdus de vue après la première consultation. La durée moyenne de traitement par les antihistaminiques chez les 123 patients régulièrement suivis, était de 9,5±8,9 semaines ; avec des extrêmes de 6 semaines à 56 semaines. L’évolution était marquée par une rémission des lésions urticariennes chez 86 (69,9%) des 123 patients régulièrement suivi jusqu’à 3 mois après l’arrêt du traitement.

Vingt-six (20,2%) patients avaient des récidives après traitement. Le délai moyen de survenue de récidive était de 4,4±1,1 mois (minimum = 4 mois et maximum = 6 mois).

DISCUSSION

Cette étude nous a permis de documenter le profil épidémiologique clinique, thérapeutique et évolutif de l’urticaire chronique en consultation dermatologique à Lomé.

Des études de prévalence de l’urticaire chronique dans la population générale ont été rapportés [2], pouvant aller jusqu’à 20%. En absence de données sur la prévalence de l’affection dans la population générale dans notre pays, nous avons mené cette étude afin de documenter la prévalence hospitalière de l’urticaire chronique.

La prévalence hospitalière de l’urticaire chronique dans notre étude était de 1,1%. Cette faible prévalence hospitalière peut s’expliquer par l’échappement aux structures spécialisées des cas d’urticaire chronique. En effet, le faible nombre de dermatologue au Togo (environs 13 dermatologues pour plus de 7 million d’habitants) fait que les patients ayant une dermatose qu’elle soit chronique ou non, peuvent soit consulter dans plusieurs structures de santé non spécialisées en dermatologie d’une part, soit faire une auto-médication d’autre part en se rendant directement dans des pharmacies pour se procurer des antihistaminique qui au Togo sont vendus sans ordonnance médicale en officine. Enfin, d’autres patients peuvent se rendre chez les tradi-thérapeutes.

L’âge moyen des patients était de 34,5 ans avec des extrêmes de 6 ans et 76 ans. Boussaid et al. en Algérie avaient rapporté un âge moyen de 39,60 ans [12]. L’urticaire chronique est survenue principalement dans notre série chez les jeunes (34,1% de patients âgés de 20 à 30 ans). Nos résultats se rapprochent de celles de la littérature où les patients d’âge compris entre 20 et 40 ans étaient les plus touchés [13]. Une prédominance féminine a été retrouvée avec un sex- ratio de 0,49 (M/F). Belhareth et al. en Tunisie avaient trouvé un sex-ratio (M/F) de 0,51 [14]. La prédominance féminine de l’urticaire a été également rapportée par plusieurs auteurs [11,15]. Celle-ci peut donc s’expliquer par un impact important du prurit sur les activités quotidiennes des femmes; les obligeant ainsi à consulter.

La majorité des patients avaient un antécédent personnel (65,1%) ou familial (38,8%) d’atopie. Belhareth et al. avaient trouvé un terrain atopique personnel et familial respectivement chez 12,5% et 7% de patients [14]. En France, l’urticaire chronique est dans 40 % des cas associée à un terrain atopique [15]. Bien que l’urticaire chronique ne soit pas une réaction allergique, une prédisposition des patients ayant des antécédents immuno-allergiques peut être évoquée dans le déclenchement ou l’aggravation des lésions.

La rhinite allergique (47,6%) et la conjonctivite allergique (44%) étaient retrouvées comme principaux antécédents personnels chez nos patients. La rhinite allergique, l’asthme, la dermatite atopique sont dans 50% des cas les antécédents personnels retrouvés selon les auteurs [2,16,17]. Il serait donc important de rechercher la présence de ces antécédents notamment dans les formes idiopathiques de l’urticaire chronique.

L’angiœdème était associé aux papules œdémateuses chez 52 (40,3%) patients. Notre résultat est similaire à celui de la Tunisie et de l’Algérie où les plaques et les angio-œdèmes coexistent dans respectivement 40% et 50% des cas [12]. Aussi, dans une étude réalisée dans plusieurs pays au Magrheb, l’angio-œdème était associé à l’urticaire dans 36% des cas [18]. L’association élevée de l’angio-œdème à l’urticaire chronique devrait faire craindre, la survenue de signe de gravité notamment des troubles respiratoires en cas d’atteinte de l’extrémité céphalique.

Tous nos patients ont été traités avec les antihistaminiques antisH1 ; principalement de deuxième génération (86%). Les antihistaminiques sont reconnus efficace dans la prise en charge de l’urticaire chronique dans 45 à 80% des cas selon les différentes études [1820]. De plus, les antihistaminiques de deuxième génération constituent le traitement de première intention et sont cités dans les recommandations internationales [15,21]. Une rémission des lésions d’urticaire jusqu’à 3 mois après l’arrêt du traitement était noté chez 68,9% des patients. Ces résultats confirment encore une fois l’efficacité des antihistaminiques dans la prise en charge des urticaires chroniques.

CONCLUSION

L’urticaire chronique est une pathologie rare en consultation dermatologique à Lomé. Cette rareté de l’affection s’explique probablement par les différents moyens thérapeutiques qui s’offrent aux patients souffrant d’urticaire chronique dans notre milieu

ACKNOWLEDGEMENTS

L’urticaire est un syndrome Clinique fréquent dans la population générale (jusqu’à 20%).

Statement of Human and Animal Rights

All the procedures followed were in accordance with the ethical standards of the responsible committee on human experimentation (institutional and national) and with the 2008 revision of the Declaration of Helsinki of 1975.

Statement of Informed Consent

Informed consent for participation in this study was obtained from all patients.

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