Péri-artérite noueuse cutanée: un cas pédiatrique

[Cutaneous polyarteritis nodosa: A paediatric case]

Khadim Diop1, Idrissa Demba Ba2, Paglan Emilienne Perronne3, Mame Téné Ndiaye1, Fatou Diassé1, Lana Yassine1, Fatime Tall3, Moussa Diallo2, Ousmane Ndiaye3, Suzanne Oumou Niang1

1Dermatology Departement, National Children’s Hospital Albert Royer, Cheikh Anta Diop University, Dakar, Sénégal, 2Paediatric Departement, National Children’s Hospital Albert Royer, Cheikh Anta Diop University, Dakar, Sénégal, 3Dermatopathology laboratory, Cheikh Anta Diop University, Dakar, Sénégal

Corresponding author: Khadim Diop, MD, E-mail: bambadiop100391@gmail.com

How to cite this article: Diop K, Ba ID, Perronne PE, Ndiaye MT, Diassé F, Yassine L, Tall F, Diallo M, Ndiaye O, Niang SO. Cutaneous polyarteritis nodosa: A paediatric case. Our Dermatol Online. 2025;16(Supp. 1):21-25.
Submission: 25.10.2024; Acceptance: 1.12.2024
DOI: 10.7241/ourd.2025S1.4

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ABSTRACT

Polyarteritis nodosa is a rare primary vasculitis. We report a pediatric case of cutaneous polyarteritis nodosa which, apart from its rarity, is characterized by clinical polymorphism leading to delayed diagnosis. A 08-year-old boy with a history of recurrent angina followed for 2 months for inflammatory polyarthralgias and myalgias, evolving in the context of long-term fever and asthenia. Dermatological examination revealed tender subcutaneous nodules, a branched livedo and ecchymotic purpura on the forearms and feet. The rest of the examination was normal, particularly cardiac, pulmonary and neurological. Deep skin biopsy of a subcutaneous nodule confirmed the diagnosis of polyarteritis nodosa. Antinuclear antibodies, anti-ECT antibodies and ANCA antibodies were negative. Oral corticosteroid therapy (prednisone 1mg/kg/day) and colchicine (1mg/day) led to remission of the clinical picture. The diagnosis of cutaneous periarteritis nodosa should be made in a child presenting with subcutaneous nodules and a branched livedo of the limbs associated with arthralgias and myalgias. Deep skin biopsy is used to confirm the diagnosis.

Key words: Polyarteritis nodosa, Cutaneous polyarteritis nodosa, Children, Dakar


RÉSUMÉ

La péri-artérite noueuse est une vascularite primitive rare. Nous rapportons un cas pédiatrique de péri-artérite noueuse cutanée, particulier outre sa rareté, par le polymorphisme clinique à l’origine d’un retard diagnostique. Un garçon âgé de 08 ans, aux antécédents d’angine à répétition, était suivi depuis 2 mois pour des poly-arthralgies inflammatoires et des myalgies, évoluant dans un contexte de fièvre au long cours et d’asthénie. L’examen dermatologique notait des nodules sous cutanés sensibles, une livedo ramifiée et un purpura ecchymotique, localisés aux avant-bras et les pieds. Le reste de l’examen était normal, en particulier cardiaque, pulmonaire et neurologique. La biopsie cutanée profonde d’un nodule sous cutané confirmait le diagnostic de péri-artérite noueuse. Les anticorps antinucléaires, anti-ECT et les ANCA étaient négatifs. Une corticothérapie orale (prednisone 1mg/kg/jour) et la colchicine (1mg/jour) ont permis une rémission du tableau clinique. Le diagnostic de péri-artérite noueuse cutanée doit être évoqué chez un enfant devant des nodules sous cutanés, une livedo ramifiée des membres associés à des arthralgies et des myalgies. La biopsie cutanée profonde permet la confirmation diagnostique.

Mots-clés: Périartérite noueuse, Périartéite noueuse cutanée, Enfant, Dakar


INTRODUCTION

La péri-artérite noueuse (PAN) est une vascularite primitive nécrosante des artères de moyen et petit calibre, d’étiologie inconnue [1]. Il existe deux formes: la PAN systémique d’évolution aigue, associée à des atteintes viscérales sévères (cœur, rein, tube digestif, système nerveux central) menaçant le pronostic vital et la PAN cutanée (PANc) d’évolution chronique et bénigne, sans atteinte viscérale grave [2,3]. La PAN cutanée, plus rare que la forme systémique, touche avec prédilection la peau, les muscles, les articulations et parfois les nerfs périphériques [3,4]. Elle se caractérise par un grand polymorphisme clinique à l’origine souvent d’une errance diagnostique [4]. Les atteintes cutanées au cours de la PAN sont fréquentes (50 à 88% des cas), souvent révélatrices du diagnostic par l’histologie cutanée [5]. Elle touche majoritairement les adultes [5]. Les formes pédiatriques semblent rares (environ 200 cas rapportés dans le monde) ou parfois méconnues [4,6]. En Afrique subsaharienne en particulier au Sénégal, aucun cas de PAN pédiatrique n’a été rapporté à notre connaissance. Nous décrivons une observation de PAN cutanée chez un enfant à Dakar dans le but de partager les particularités diagnostiques, thérapeutiques et évolutives.

OBSERVATION

Un garçon âgé de 8 ans, était reçu au service de Dermatologie Pédiatrique pour des nodules sous cutanés douloureux des avant-bras. L’interrogatoire rapportait dans ses antécédents des angines à répétition. Il était suivi depuis 2 mois pour des arthralgies inflammatoires des grosses articulations non déformantes, intéressants les coudes, les poignets, les chevilles et les genoux avec parfois des épisodes d’impotence fonctionnelle des membres, évoluant dans un contexte de fièvre au long cours et d’asthénie. Le diagnostic de rhumatisme articulaire aigu était initialement suspecté mais non confirmé. A l’admission, l’état général était conservé et les constantes normales. L’examen dermatologique retrouvait des nodules sous cutanés sensibles à la palpation au niveau des avant-bras (Fig. 1a), un purpura ecchymotique (Fig. 1b) et une livedo ramifiée aux pieds, les jambes et les avant-bras. Le reste de l’examen clinique était normal en particulier l’examen neurologique, cardiaque et pulmonaire. La biopsie cutanée profonde d’un nodule sous-cutané retrouvait une extravasation des globules rouges associée à un dense infiltrat de lymphocytes et de neutrophiles en leucocytoclasie et des foyers de nécrose fibrinoïde au sein des septas hypodermiques, en faveur d’une péri-artérite noueuse (Fig. 2a et 2b). Les anticorps anti-nucléaires, anti DNA natifs et ANCA étaient négatifs. La protéinurie des 24h était normale à 0,03g. L’électrocardiogramme, l’échographie abdomino-pelvienne et la radiographie du thorax étaient normaux. Le diagnostic de péri-artérite noueuse cutanée était retenu. De la colchicine à 1mg/jour associée à une corticothérapie orale (prednisone 1mg/kg/jour puis une dégression rapide à 1 mois) ont permis une amélioration du tableau clinique.

Figure 1: (a) Nodules sous cutanés et livedo des avant-bras. (b) Purpura ecchymotique des pieds.

[(a) Subcutaneous nodules and livedo of the forearms. (b) Ecchymotic purpura of the feet.]

Figure 2: (a) Vascularite leucocytoclasique hypodermique (HEx100). (b) Extravasation des globules rouges associée à un dense infiltrat de lymphocytes et de neutrophiles en leucocytoclasie et des foyers de nécrose fibrinoïde au sein des septas hypodermiques (HEx200).

[(a) Hypodermal leukocytoclastic vasculiti (HEx100). (b) Extravasation of red blood cells associated with a dense infiltrate of lymphocytes and neutrophils in leukocytoclasia and foci of fibrinoid necrosis in the hypodermal septa (HEx200).]

DISCUSSION

Nous avons rapporté une observation de péri-artérite noueuse cutanée pédiatrique dont les particularités sont: la rareté, le retard diagnostique et l’atteinte cutanée révélatrice grâce à l’apport de l’histologie cutanée.

La péri-artérite noueuse est une vascularite primitive nécrosante des artères de petit et moyen calibre [1]. C’est une vascularite rare, pouvant toucher toutes les tranches d’âge (3 à 81 ans) et majoritairement les adultes (40-60ans) [1,5,6]. Son incidence annuelle serait estimée entre 0 à 1,6 cas/millions d’habitants en Europe [5]. Les formes pédiatriques semblent plus rares (environ 200 cas rapportés dans le monde) [46]. En Afrique subsaharienne en particulier au Sénégal, il n’existe quasiment pas de données sur cette pathologie. Cette rareté dans notre contexte pourrait s’expliquer par le polymorphisme clinique de cette affection à l’origine souvent d’une errance diagnostique.

Il existe une forme cutanée pure (PAN cutanée), décrite pour la première fois par Lindberg en 1931 [5,6]. La PAN cutanée affecte la peau, les muscles, les articulations et parfois les terminaisons nerveuses sensitives. Les atteintes viscérales sont exceptionnelles et l’évolution chronique, bénigne, comme constatée dans notre observation [3,4]. Contrairement à la forme systémique (PAN systémique) qui est d’évolution aigue, de mauvais pronostic avec des atteintes viscérales sévères (cœur, rein, système nerveux central, tube digestif) pouvant menacer le pronostic vital [2,3]. Les formes de passage entre ces deux entités semblent exceptionnelles.

Les atteintes cutanées au cours de la PAN sont fréquentes, retrouvées dans 50 à 88% des cas, avec une plus grande fréquence chez l’adulte que chez l’enfant [5,7]. Elles peuvent être inaugurales ou survenir au décours de l’évolution à l’origine parfois du retard diagnostique. C’était le cas chez notre malade où l’atteinte initiale était articulaire, musculaire puis cutanée. Les signes cutanés les plus fréquents sont des nodules sous cutanés sensibles aux extrémités des membres (80%), une livedo ramifiée infiltrée (56%) et des ulcérations (49%). D’autres manifestations cutanées, plus rares, ont été décrites: purpuras vasculaires, des plaques indurées, des nécroses cutanées ou une gangrène distale [57]. Les lésions siègent avec prédilection au niveau des extrémités en regard des trajets vasculaires (jambes 97%, avant-bras 33%, tronc 8%) [5,7]. Les manifestations extra-cutanées sont représentées par la fièvre au long cours, une asthénie, une anorexie, des arthralgies inflammatoires non déformantes ou arthrites et des myalgies et dans environ un tiers des observations une neuropathie périphérique de type sensitif, très douloureuse, siégeant dans le même territoire que les manifestations cutanées [5,7,8].

Le retard diagnostique (2 mois) remarqué dans notre cas est probablement lié au polymorphisme clinique de la maladie avec des manifestations inaugurales articulaires et musculaires inflammatoires qui ont fait dérouter le diagnostic avec le rhumatisme articulaire aiguë, l’arthrite chronique juvénile.

L’histologie cutanée d’une biopsie profonde d’un nodule permet la confirmation diagnostique, en montrant une vascularite d’une artère de petit et/ou moyen calibre du derme profond ou de l’hypoderme associée à une nécrose fibrinoïde et un infiltrat de polynucléaires neutrophiles, d’éosinophiles et de lymphocytes [3,4,6,7].

A l’heure actuelle, les causes de la PAN cutanée sont inconnues. Cependant, quelques facteurs étiologiques sont incriminés dans la littérature chez l’enfant souvent les infections streptococciques, plus rarement les virus de l’hépatite B et C, l’infection à VIH et récemment certains terrains génétiquement déterminés: les déficits en adénosine désaminase 2 (ADA 2), le syndrome VEXAS [4,7]. Dans notre cas, le seul facteur incriminé était l’antécédent d’angine à répétition, qui pourrait suggérer le rôle d’une éventuelle infection streptococcique, sans preuve formelle.

Le traitement de la PAN cutanée de l’enfant est non codifié. Plusieurs traitements sont proposés dans la littérature [9]. Dans les formes purement cutanées en première intention, l’utilisation de la colchicine (1 à 2 mg/jour) ou la disulone est recommandée. Dans les formes avec des atteintes cutanées, articulaires, musculaires et/ou neurologiques, une association: colchicine et predinosone (0,5 à 1mg/kg/jour) et/ou immunosuppresseurs (méthotrexate, cyclophosphamide, azathioprine) est préconisée. D’autres traitements ont été proposés dans les formes sévères: les anti-TNF, les anti JAK, les Immunoglobulines intraveineuses. Chez notre malade, la colchicine associée à la prednisone a permis une amélioration favorable du tableau clinique. Toutefois, le traitement reste suspensif, l’évolution peut être émaillée de nouvelles poussées entrecoupées de phases de rémissions, justifiant l’éducation thérapeutique pour un suivi au long cours.

CONCLUSION

La PAN est une vascularite primitive rare, surtout chez l’enfant et parfois méconnue. Le diagnostic de PAN cutanée devrait être évoqué devant des nodules sous cutanés sensibles associés à des signes généraux (fièvre, asthénie, altération état général), des arthralgies ou myalgies. La biopsie cutanée profonde peut aider au diagnostic. Un terrain génétique sous-jacent (déficit en Adénosine désaminase 2) doit être recherché devant un contexte clinique évocateur.

Consent

The examination of the patient was conducted according to the principles of the Declaration of Helsinki.

The authors certify that they have obtained all appropriate patient consent forms, in which the patients gave their consent for images and other clinical information to be included in the journal. The patients understand that their names and initials will not be published and due effort will be made to conceal their identity, but that anonymity cannot be guaranteed.

REFERENCES

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9. Wolff L, Horisberger A, Moi L, Karampetsou MP,?Comte D. Polyarteritis Nodosa:Old Disease, New Etiologies. Int J Mol Sci. 2023;24:16668.

Notes

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