La cytostéatonecrose du nouveau-ne au chu de Conakry: a propos d’une nouvelle observation

[Cytosteatonecrosis in newborns at Conakry chu: About a new observation]

Mamadou Diouldé 1 Kanté1, Boh Fanta Diané1,2, Fatimata Keita1,2, Abdoulaye Sadio Diallo3, Kade Fofana1, Marguerite Bomboh Bangoura1, Aïssatou Bobo Diallo1, Thierno Mamadou Tounkara1,2

1Department of Dermatology-Venerology, Donka National Hospital, Conakry, Guinea, 2Faculty of Health Sciences and Technologies, University of Conakry, Guinea, 3Department of Anatomy Cytopathology, Donka National Hospital, Conakry, Guinea

Corresponding author: Mamadou Diouldé 1 Kanté, MD. E-mail: diouldekante18@gmail.com

How to cite this article: Kanté MD1, Diané BF, Keita F, Diallo AS, Fofana K, Bangoura MB, Diallo AB, Tounkara TM. Cytosteatonecrosis in newborns at Conakry chu: About a new observation. Our Dermatol Online. 2022;13(Supp. 2):58-62.
Submission: 29.08.2022; Acceptance: 01.10.2022
DOI: 10.7241/ourd.2022S2.8

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ABSTRACT

Cytosteatonecrosis is an acute condition of unknown pathogenesis that occurs in the first weeks of extra-uterine life. It presents clinically in the form of a large plaque, indurated and sometimes nodular. It often sits on the trunk, buttocks and thighs (root of the limbs). The course of cytosteatonecrosis is benign but sometimes enamelled with complications such as hypercalcemia and metabolic disorders. The rarity of this affection would be justified by the ignorance of the cutaneous signs. We report here a case of neonatal cytosteatonecrosis remarkable for the delay in diagnosis and the efficacy of low-dose corticosteroid therapy.

Key words: Cytosteatonecrosis; Induration; Newborn


RESUME

La cytostéatonecrose est une affection aigue, de pathogénie inconnue qui survient dans les premières semaines de vie extra-utérine. Elle se présente cliniquement sous forme de vaste placard, induré et parfois nodulaire. Elle siège souvent au tronc, fesses et cuisses (racine des membres). L’évolution de la cytostéatonecrose est bénigne mais parfois émaillée de complications comme l’hypercalcémie et les troubles métaboliques. La rareté de cette affection se justifierait par la méconnaissance des signes cutanés. Nous rapportons ici un cas de cytostéatonecrose néonatale remarquable par le retard diagnostique et l’efficacité de la corticothérapie à faible dose.

Mots clés: Cytostéatonecrose, Induration, Nouveau-né


INTRODUCTION

La cytostéatonecrose du nouveau-né (CSNN) est une hypodermite aiguë survenant durant les premiers jours de vie extra-utérine [1]. La présentation clinique varie selon le phototype du patient. Des placards cutanés indurés, violacés sur peau claire et de vastes placards hyperchromiques indurés sur peau noire sont souvent observés. La localisation des lésions est ubiquitaire. Elle siège principalement au niveau du visage, du tronc, des fesses et de la racine des membres [2]. Les facteurs de risque classiquement rapportées sont la macrosomie fœtale souvent dans un contexte de mère diabétique, l’asphyxie périnatale, l’hypothermie sévère et les traumatismes tissulaires au cours de manœuvres instrumentales ou au décours de la réanimation néonatale [3,4]. L’évolution de la cytostéatonecrose est très souvent bénigne cependant des complications peuvent être observées comme l’hypercalcémie sévère pouvant engager le pronostic vital du patient [5]. Il s’agit d’une pathologie rarement décrite sur peau noire et souvent méconnue en pratique courante. Nous rapportons ici une nouvelle observation remarquable par l’errance diagnostique et l’efficacité de la corticothérapie à dose faible.

OBSERVATION

Il s’agit d’un nouveau-né de sexe féminin, né à terme (38 semaines d’aménorrhée) par voie basse dans un contexte de souffrance fœtale aigue. Le poids de naissance était de 4500 grammes. Une manœuvre d’expression abdominale a été réalisée en vue de favoriser l’expulsion fœtale suivie d’une réanimation du nouveau-né.

Au huitième jour de vie extra-utérine, des lésions cutanées siégeant au dos ont été constatées par les parents. Après 17 jours d’évolution et de traitement inadéquat et, vue l’extension des lésions cutanées associée à une irritabilité, une constipation et des vomissements, ce nouveau-né nous a été adressé.

L’observation des lésions montrait de vastes placards érythémateux, indurés, nodulaires par endroits, bilatéraux siégeant au tronc (antérieur et postérieur), cuisses et fesses (Figs. 1a et 1b).

Figure 1a: (a) Vaste placard induré sous cutané au niveau du tronc. (b) Placards indurés sous cutanés au niveau des cuisses et fesses.

Au décours de l’examen physique, le diagnostic de Cytostéatonecrose du nouveau-né a été évoqué. Une première calcémie a été mesurée à 3,8 mmol/l. Le syndrome inflammatoire biologique était retrouvé avec une hyperleucocytose à 15400/mm3, CRP = 35 mg/l. L’ECG était normal. Le taux d’hémoglobine, les plaquettes et les triglycérides étaient restés normaux. La biopsie cutanée au punch avec examen histologique, a montré au niveau de l’hypoderme un tissu adipeux siège d’une nécrose éosinophile diffuse avec un discret infiltrat inflammatoire. Cet aspect confirmait la cytostéatonecrose cliniquement évoquée (Fig. 2). Elle a été mise sous corticoïde par voie orale (Bétamethasone 0,3 mg/kg/jour) pendant seize (16) jours associées à une réhydratation orale (50 à 100ml/kg par jour) et d’un arrêt de toute supplémentation en vitamine D et en calcium.

Figure 2: Tissu adipeux siège d’une nécrose éosinophile diffuse avec un discret infiltrat inflammatoire (HE X 10).

Une semaine après l’arrêt de la corticothérapie, la calcémie mesurée était de 2,35 mmol/l et les lésions cutanées en nette régression.

Après un recul de trois semaines, les placards indurés nodulaires avaient complètement disparu sans séquelles (Fig. 3).

Figure 3: Après un recul de 3 semaines, disparition des placards sous cutanés .

DISCUSSION

Nous avons décrit ce cas de CSN néonatale dans le but de rappeler la symptomatologie et d’en raccourcir le délai diagnostique dans notre contexte.

Bien que la CSN en période néonatale soit très bien décrite, sa survenue reste très rare. Le diagnostic clinique est souvent méconnu et l’aspect des lésions peut faire évoquer d’autres hypothèses diagnostiques telles qu’un sclérème, une cellulite ou une myosite voire un abcès [6,7] d’où l’énorme temps écoulé entre le début de la symptomatologie de notre patiente et sa prise en chargé adéquate. La prévalence de la CSNN reste encore difficile à estimer du fait de l’errance diagnostique [8].

La pathogénie reste mal élucidée. Plusieurs hypothèses ont été évoquées en rapport avec une anomalie des tissus graisseux: trouble du métabolisme des graisses avec excès de graisses saturées dans le tissu sous-cutanés, hypoxie par souffrance néonatale ou hypothermie favorisant la cristallisation des graisses saturées et la nécrose graisseuse [3,9]. Cette pathologie touche de préférence les nouveau-nés à terme ou en post-termes dans des conditions d’asphyxie périnatale, de traumatisme obstétrical, de manœuvre abdominale (compression) [6,8,10]. Notre patiente était née à terme par voie basse dans un contexte de souffrance fœtale associé à un traumatisme tissulaire au cours de manœuvre instrumentales.

Des anomalies biologiques sont fréquemment retrouvées au cours de la cytosteatonécrose du nouveau-né. Il s’agit de la présence d’une anémie ou d’une thrombocytose qui peuvent être responsables d’hypoxie périphérique, ou encore de dyslipidémie familiale qui serait responsable de la présence des cristaux au niveau des adipocytes et des cellules géantes multinucléées car ces cristaux sont composés de triglycérides [2,7]. Chez notre patiente, il n’y avait pas d’anémie, pas de thrombocytose ou d’anomalies au niveau des triglycérides.

Les lésions de la CSNN apparaissent très souvent pendant les quatre premières semaines de la vie extra-utérine. Elle se manifeste le plus souvent dans la première semaine par un érythème, des lésions d’hypodermite plus ou moins diffuses, violacées ou rouges sur peau claire et hyperchromiques sur peau noire, souvent douloureuses qui se généralisent par la suite [4,8]. Le mode d’installation des lésions cutanées chez notre patiente est identique à ceux rapportés dans la littérature.

Le pronostic de la CSSN est conditionné par la possible survenue d’une hypercalcémie, parfois tardive. Cette complication justifie la nécessité d’une surveillance clinique hebdomadaire et prolongée [6,11]. Cette hypercalcémie, même asymptomatique entraine des dépôts calciques au niveau cardiaque, hépatique, neurologique, veineux et dans la majorité des cas rénale à type de néphrocalcinoses ou de lithiases. Ces dépôts calciques constituent en réalité la seule crainte au cours du CSNN car ils entrainent des calcifications viscérales parfois létales [4,9]. Elle est observée dans un tiers des cas, surtout dans les formes disséminées et apparait plusieurs jours (jusqu’à 2 mois) après l’apparition des signes cutanées [4,7,12]. Une hypercalcémie symptomatique avait été retrouvée chez notre patiente quelques jours après le début des signes cutanés.

Il n’existe pas de traitement défini pour la CSNN [9]. Les thérapeutiques préconisées sont la corticothérapie, les diurétiques, l’hydratation et les biphosphonates pour passer la phase aiguë [2,10]. Un régime pauvre en calcium et en vitamine D comme complément thérapeutique a été également jugé efficace dans d’autres observations cliniques rapportées [2,4]. En cas d’hypercalcémie symptomatique (difficultés de tétés, des vomissements, une anorexie, une agitation), il est préconisé une hyperhydratation avec du sérum salé isotonique à raison de 3ml/m2/jour, des diurétiques de l’anse et un régime pauvre en calcium et en vitamine D qui peuvent être associés à l’administration des corticoïdes à faible dose et de calcitonine [4,7,9].

La CSN est en règle bénigne avec une évolution vers la guérison sans séquelle. C’est fut le cas de notre patiente après un recul de 12 semaines. La corticothérapie par voie générale, à faible dose (0,3 mg/kg/jour) associée à une réhydratation orale (50 ml/kg par jour) et d’un arrêt de toute supplémentation en vitamine D et en calcium avait favorisé la disparition des signes fonctionnels et la régression de l’induration sans atrophie après seize (16) jours du traitement chez notre patiente.

Déclaration des droits de l’homme et des animaux

Toutes les procédures étaient conformes aux normes éthiques du comité responsable de l’expérimentation humaine (institutionnel et national) et à la déclaration d’Helsinki de 1975, telle que révisé en 2008.

Déclaration de consentement

Le consentement éclairé a été obtenu des deux parents du nourrisson pour la publication de cette observation.

REFERENCES

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Notes

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