Pustulose exanthématique aiguë généralisée imputable au Phloroglucinol (Spasfon®): Un cas au Centre Hospitalier et Universitaire de Yaoundé, Cameroun
[Acute generalized exanthematous pustulosis due to Phloroglucinol (Spasfon®): A case at the Teaching Hospital of Yaounde, Cameroon]
Emmanuel Armand Kouotou1, Nina Maffo1,2, Bérénice Degboe2, Coralie Reine Mendouga Menye1, Défo Défo3, Alida Kouassi2, Félix Atadokpede2
1Department of Internal Medicine and Specialties, CHU de Yaoundé, Université de Yaoundé I, Cameroun, 2Department of Dermatology and Venerology, CNHU-HKM de Cotonou, Université d’Abomey-Calavi, Bénin, 3Department of Dermatology and Venerology, Hôpital central de Yaoundé, Université de Yaoundé I, Cameroun
Corresponding author: Emmanuel Armand Kouotou, MD
Submission: 11.01.2021; Acceptance: 09.04.2021
DOI: 10.7241/ourd.2022s2.2
Cite this article: Kouotou EA, Maff o N, Degboe B, Mendouga Menye CR, Défo D, Kouassi A, Atadokpede F. Pustulose exanthématique aiguë généralisée imputable au Phloroglucinol (Spasfon®): Un cas au Centre Hospitalier et Universitaire de Yaoundé, Cameroun, Cameroon] Acute generalized exanthematous pustulosis due to Phloroglucinol (Spasfon®): A case at the Teaching Hospital of Yaounde, Cameroon. Our Dermatol Online. 2021;12(Supp. 2):6-10.
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ABSTRACT
Described for the first time in 1980 by BEYLOT et al, acute generalized exanthematous pustulosis (AGEP) is a rare and serious condition characterized by the sudden onset of a pustular and scarlatiniform febrile rash. In more than 90% of cases it is caused by medication, but can also be caused by a virus (enterovirus infection: coxsackie, echovirus or cytomegalovirus), a toxic agent (mercury) or a food allergen. The evolution of AGEP is usually favourable to the discontinuation of the drug in question with a delay varying from 48 hours to 15 days. We report a case of AGEP for which the drug responsible was not one of the drugs classically incriminated.
Key words: Generalized pustulosis; Fever; Phloroglucinol; Drug eruption; Cameroon
RÉSUMÉ
Décrite pour la première fois en 1980, par BEYLOT et al, la pustulose exanthématique aiguë généralisée (PEAG) est une affection rare et grave, caractérisée par la survenue brutale d’une éruption fébrile pustuleuse et scarlatiniforme. D’origine médicamenteuse dans plus de 90% des cas, elle peut également être due à une virose (infection à entérovirus: coxsackie, échovirus ou à cytomégalovirus), à un toxique (mercure) ou à un allergène alimentaire. L’évolution de la PEAG est habituellement favorable à l’arrêt du médicament en cause avec un délai variant de 48 heures à 15 jours. Nous rapportons un cas de PEAG pour lequel le médicament responsable ne faisait pas partie de ces médicaments classiquement incriminés.
Mots clés : Pustulose généralisée; Fièvre; Phloroglucinol; Toxidermie médicamenteuse; Cameroun
INTRODUCTION
La pustulose exanthématique aiguë généralisée (PEAG) est une réaction cutanée fébrile érythémato-oedémateuse disséminée, rapidement couverte de petites pustules non folliculaires superficielles et amicrobiennes, prédominant au tronc et aux grands plis [1]. L’éruption cutanée s’associe à une altération de l’état général et une hyperleucocytose à prédominance neutrophile. La régression spontanée est rapide, les pustules disparaissent en quelques jours avec une desquamation diffuse [2]. La PEAG est une toxidermie sévère dont les principaux médicaments inducteurs sont désormais bien connus : la pristinamycine, l’ampicilline, les quinolones, l’hydroxychloroquine, les sulfamides antibactériens, la terbinafine, les antifongiques azolés et le diltiazem [3]. Cette toxidermie débute en général un à onze jours après administration du médicament causal [4]. Actuellement, la nouvelle classification du “ groupe européen d’étude des effets secondaires cutanés sévères “ (EUROSCAR) reposant sur des critères cliniques, histologiques et évolutifs a permis de mieux différencier la PEAG d’autres dermatoses similaires cliniquement et/ou histologiquement [1].
OBSERVATION
Mademoiselle X âgée de 23 ans, venue consulter pour des lésions solides prurigineuses évoluant depuis 5 jours. Ces lésions étaient associées à une fièvre non chiffrée, poussant la patiente à pratiquer une automédication à base de Dexaméthasone injectable et comprimés et Desloratadine 5 mg comprimés. Une consultation dermatologique a été faite et le diagnostic d’exanthème maculo-papuleux fut posé avec prescription d’un émollient et d’un antihistaminique. Trois jours après, il y eut une flambée des lésions avec apparition de nombreuses pustules sur les lésions préexistantes, elles siégeaient principalement au visage, au tronc et aux plis axillaires. Après un interrogatoire poussé, une notion de prise médicamenteuse a été retrouvée : de l’Oméprazole comprimés pour des épigastralgies et du Phloroglucinol injectable pour des dysménorrhées respectivement 18 et 09 jours avant le début de la symptomatologie. A l’examen physique, on notait un bon état général et sur le plan dermatologique, des plaques érythémateuses et œdémateuses parsemées de pustules (Figs. 1a et 1b) mal limitées coexistant avec des lésions à type de cocardes (Fig. 1c). Il n’y avait pas d’atteinte des muqueuses et le reste de l’examen était normal.
Figure 1. (a): érythème diffus du tronc antérieur; (b): nombreuses pustules reposant sur une base érythémateuse; (c): lésions à type de cocarde du creux axillaire. |
Au vu de tous ces éléments cliniques, le diagnostic de PEAG fut évoqué
Les examens paracliniques ont montré (i)- à l’histologie : un épithélium de surface atrophique avec élongation des crêtes épidermiques (Fig. 2), nécrolyse épidermique et disparition de la jonction dermoépidermique avec orthokératose (Fig. 3); le derme superficiel était fibreux avec exsudation abondante et un infiltrat inflammatoire mixte fait en majorité d’éléments chroniques dans les proportions de 85%. Mêlés à des polynucléaires neutrophiles (15%) groupés en îlots périvasculaires et participation de quelques éosinophiles (Fig. 4); (ii)- un hémogramme normal ; (iii)- les TPHA-VDRL négatifs ; (iv)- une urémie légèrement basse à 0,13 g/dl ; (v)- la créatininémie et les transaminases hépatiques normales.
Sur la base de ces arguments anamnestiques, cliniques et histopathologiques, le diagnostic de PEAG fut confirmé imputable au Phloroglucinol (Spasfon®), avec un score de 9/12 selon l’EuroSCAR.
Un traitement à base de dermocorticoïde (prednicarbate), d’antihistaminique (desloratadine), d’émollient a été prescrit avec éviction du phloroglucinol. Une semaine après le début du traitement, on a noté une desquamation diffuse (Figs. 5a et 5b); et une guérison complète à deux semaines du traitement avec persistance de lésions séquellaires (Fig. 5c).
Figure 5. (a) et (b) : desquamation diffuse; (c) : guérison avec lésions sequellaires |
DISCUSSION
Nous décrivons probablement le premier cas de PEAG imputable au phloroglucinol au Cameroun et le deuxième cas connu à ce jour [5]. La PEAG est une toxidermie rare, parfois grave, avec une prédilection féminine [6]. Le phloroglucinol est une molécule ne faisant pas partie des médicaments classiquement décrits comme étant responsables de la PEAG. Ceux –ci sont dominées par les antibiotiques et l’hydroxychloroquine avec un délai variant en moyenne d’un à onze jours après prise du médicament inducteur [3,4]. Dans notre cas le médicament incriminé a été pris neuf jours avant le début de la symptomatologie.
Le diagnostic est retenu devant la chronologie, les signes cliniques et paracliniques, cela en respectant les critères diagnostiques de la PEAG selon l’EuroSCAR. Ces critères sont définis par : la morphologie des lésions, la présence de l’érythème, la distribution des lésions, desquamation post-pustulaire, les symptômes, la neutrophilie et l’histopathologie. Selon cette classification, le diagnostic de PEAG est écarté si le score est égal à 0, possible s’il est compris entre 1 et 4, probable entre 5 et 7 et certain entre 8 et 12 [7]. Chez notre patiente le score se chiffrait à 9/12. La survenue d’une éruption maculo-papuleuse précède la survenue des pustules et une forte neutrophilie [7,8], comme c’était le cas chez notre patiente avec cependant un hémogramme normal. Lors des bilans biologiques, le nombre de neutrophiles est normal dans 10% des cas et dans 70 % des cas l’on ne retrouve pas d’éosinophilie [9], ce qui pourrait expliquer la normalité de l’hémogramme chez un petit nombre de patients comme dans notre cas. L’histologie est dominée par la présence de pustules sous cornées et un infiltrat périvasculaire à prédominance neutrophile avec de rares éosinophiles [8,10], chez notre patiente nous n’avons pas retrouvé les pustules sous-cornées mais un infiltrat neutrophilique et quelques éosinophiles a été noté.
Les pratiques thérapeutiques ont changé avec une utilisation significativement plus fréquente et actuellement quasi-systématique des dermocorticoïdes dans le but de contrôler l’inflammation cutanée [11,12] ; ce qui a été le cas chez notre patiente où le dermocorticoïde a permis une disparition de l’érythème et des lésions œdémateuses. L’ingestion du médicament inducteur sera responsable d’une réaction de type IV par l’action coordinatrice de cellules T via IL8 et les cytokines entrainant une neutrophilie cutanée dont formation de pustules, de ce fait à l’arrêt du médicament inducteur entrainera une disparition des pustules [13].
CONCLUSION
La PEAG est une toxidermie grave et rare qui peut être induite par tout médicament, d’où l’intérêt de faire un interrogatoire policier. Nous avons rapporté ici, à notre connaissance le deuxième connu à ce jour sur la responsabilité du Phloroglucinol dans la survenue de la PEAG. La prescription de dermocorticoïde doit être systématique lorsque le diagnostic est posé.
Consent
The examination of the patient was conducted according to the principles of the Declaration of Helsinki.
The authors certify that they have obtained all appropriate patient consent forms, in which the patients gave their consent for images and other clinical information to be included in the journal. The patients understand that their names and initials will not be published and due effort will be made to conceal their identity, but that anonymity cannot be guaranteed.
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Notes
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