Infection à COVID-19 révélée par une poussée de psoriasis chez un Camerounais âgé : à propos d’un cas

[COVID-19 infection revealed by a flare-up of psoriasis in an elderly Cameroonian: about a case]

Odette Berline Sigha1,2, Emmanuel Armand Kouotou3,4

1Faculty of Health Science, University of Bamenda, Cameroun, 2Service de Dermatologie Hôpital Laquintinie de Douala, Cameroun, 3Faculté de Médecine et des Sciences Biomédicales, Université de Yaoundé 1, Cameroun, 4Service de Dermatologie du Centre Hospitalier Universitaire de Yaoundé, Cameroun

Corresponding author: Odette Berline Sigha, MD


Submission: 11.09.2020; Acceptance: 16.12.2020

DOI: 10.7241/ourd.2021s1.4

Cite this article: Sigha OB, Kouotou EA. Infection à COVID-19 révélée par une poussée de psoriasis chez un Camerounais âgé : à propos d’un cas. [COVID-19 infection revealed by a flare-up of psoriasis in an elderly Cameroonian: about a case]. Our Dermatol Online. 2021;12(Supp. 1):16-20.

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ABSTRACT

The impact of COVID-19 on classical dermatosis and on patients receiving immunosuppressive for chronical skin disease is yet to be known. We report a case of a 76-year-old patient consulting for a flare-up of psoriasis, developing in a context of fever and dyspnea not responding to classic antimalarial and anticough treatment. The chest scanner performed revealed areas of multifocal, bilateral and asymmetric frosted glasses, confirming with anamnestic data and clinical evidence a COVID-19 infection. The evolution was favorable both at the pulmonary and skin levels after 10 days. We reported a specific case of COVID-19 revealed by an outbreak of psoriasis. The immunological similarities between these two conditions suggest that COVID-19 infection may have played a role in triggering the flare.

Key words: COVID-19; Psoriasis; Cameroon


RÉSUMÉ

L’impact du COVID-19 sur les dermatoses courantes, et chez les patients recevant un traitement immunosuppresseurs pour dermatose chronique est encore peu connu. Nous rapportons le cas d’un patient de 76 ans consultant pour une poussée de psoriasis, évoluant dans un contexte de fièvre et dyspnée ne cédant pas sous traitement antipaludéen classique et antitussif. Le scanner thoracique réalisé a mis en évidence des plages de verres dépolis multifocales, bilatérales et asymétriques confirmant avec les données anamnestiques et clinque à une infection par le COVID-19. L’évolution a été favorable tant sur le plan pulmonaire que cutanée au bout de 10 jours. Nous avons rapporté un cas particulier de COVID-19 révélé par une poussée de psoriasis. Les similitudes immunologiques entre ces deux pathologies nous font penser que l’infection à COVID-19 aurait joué un rôle dans le déclenchement de la poussée.

Mots clés: COVID-19; Psoriasis; Cameroun


INTRODUCTION

La maladie à coronavirus 2019 (COVID-19) est originaire de la ville de Wuhan, en Chine, et s’est propagée rapidement dans le monde entier. Le COVID-19 est causé par un nouveau coronavirus, appelé coronavirus 2 du syndrome respiratoire aigu sévère (SARS-CoV-2) [1].

Les coronavirus humains sont actuellement au nombre 7 parmi lesquels le SARS-CoV 1 (Severe acute respiratory syndrome associated coronavirus 1) le MERS-CoV (Middle-East respiratory syndrome- related coronavirus), et depuis peu le SARS-CoV2 sont les seuls à être associés à un syndrome de détresse respiratoire aigu (SDRA) [2].

Au Cameroun, les premiers cas de COVID-19 ont été signalés en fin février 2020 [3], avec à ce jour environ 12.592 cas confirmés parmi lesquels on compte 313 décès [4].

Les patients atteints de COVID-19 présentent principalement de la fièvre et des symptômes respiratoires. D’autres symptômes tels que l’anosmie, l’agueusie et diarrhée peuvent être associées [5]. Avec le COVID-19, bien que nous soyons à un stade précoce de la pandémie, des manifestations cutanées chez les patients infectés commencent à émerger [59].

L’impact du COVID-19 sur les dermatoses courantes, ou chez les patients recevant un traitement immunosuppresseurs est peu connu. Kutlu et al. suggèrent que les patients atteints de certaines dermatoses, en particulier les infections fongiques superficielles et le psoriasis, peuvent être plus vulnérables au COVID-19 [10]. Mohamed et al. pensent que le zona pourrait être un indicateur de l’infection latente au COVID-19 [11].

Nous rapportons le cas d’un patient Camerounais de 76 ans suivi pour psoriasis stable depuis 2 ans sous Méthotrexate, qui a vu réapparaitre de nouvelles lésions 7 jours après le début d’une fièvre.

OBSERVATION

Le 24/04/2020 un patient de 76 ans consultait dans notre service pour une poussée de psoriasis évoluant depuis une semaine. Il avait comme antécédents une Hépatite virale C traitée et guérie depuis 2 ans, et un psoriasis pour lequel il était suivi dans notre service depuis plusieurs année et relativement stable sous Méthotrexate (15 mg par semaine) et Acide folique (5 mg par semaine).

A l’anamnèse, il disait avoir depuis 2 semaines, une fièvre, des courbatures et une asthénie. Tous ces symptômes s’étaient installés 7 jours après contact avec un membre de sa famille venant de France et confiné dans un hôtel réquisitionné par l’Etat camerounais pour tous les passagers des vols internationaux à leur arrivée sur le territoire camerounais. Notre patient avait consulté dans une clinique de la place le 14/04/2020 pour les symptômes suscitées, les examens paracliniques suivants avaient été réalisés : Goutte épaisse : négative ; CRP : < 6 mg/l ; transaminases (ASAT : 21,18 UI/L, ALAT : 20,19 UI/L) ; glycémie à jeun : 1,05 g/ml. Malgré ces résultats normaux le patient avait été mis sous traitement antipaludéen (Arthemether/Lumefantrine : 1 comprimé 2 fois par jour pendant 3 jours), antipyrétique (Paracétamol : 1 gramme 3 fois par jour) et complexe vitaminique (1 comprimé par jour). Trois jours après le début de ce traitement, s’installaient une toux sèche, des douleurs à la poitrine, sur fond d’asthénie et de fièvre persistance motivant une nouvelle consultation où un antitussif fut ajouté au traitement en cours. A partir du le 20/04/20, en plus de la persistance de ces symptômes le patient notait l’apparition progressive des plaques de psoriasis ce qui l’amènera à consulter en dermatologie 4 jours plus tard.

A l’examen clinique, le patient avait un état général altéré, une saturation en oxygène de 95 % et était subfébrile (T° : 37,5°C).

Sur le plan cutanée on notait des plaques érythémato-squameuses siégeant sur le cuir chevelu, le tronc, les membres inferieures et supérieures, sur la zone T du visage (Figs. 1 et 2). Des râles crépitants étaient entendus aux bases pulmonaires, et ailleurs le reste de l’examen physique était sans particularité.

Figure 1: Plaques érythémato-squameuses du cuir chevelu [Erythematous-squamous plaques of the scalp]
Figure 2: Plaques érythémato-squameuses du tronc [Erythematous-squamous plaques of the trunk]

Devant ce tableau clinique, nous avons suspecté une poussée de psoriasis associée à une infection par le COVID-19. Compte tenu l’indisponibilité des tests sérologiques, nous avons réalisé en urgence chez notre patient un scanner thoracique qui a mis en évidence des plages de verres dépolis multifocales, bilatérales et asymétriques (Figs. 3 et 4) confirmant ainsi le diagnostic de COVID-19.

Figure 3: Scanner thoracique (coupe longitudinale et transversale) [Chest CT scan (longitudinal and transverse sections)]
Figure 4: Scanner thoracique (coupe transversale) montrant des opacités bilatérales en verre dépoli [Chest CT scan (transverse section) showing bilateral ground glass opacities]

Tous ces éléments cliniques et paracliniques nous ont fait retenir chez ce patient le diagnostic de COVID-19 révélé par une poussée de psoriasis.

Sur le plan thérapeutique, le patient a été référé en urgence dans une structure sanitaire dédiée aux patients COVID-19 positifs pour une meilleure prise en charge. Le Méthotrexate a été arrêté et le patient mis sous Hydroxychloroquine associée à l’Azythromicine, la Vitamine C et le Zinc. L’évolution sur le plan pulmonaire a été favorable au bout de 10 jours. Pour ce qui est du psoriasis, un dermocorticoïde (Dipropionate de bétamethasone) a été appliqué ; une nette amélioration des lésions cutanées était déjà observable 10 jours après le début du traitement anti-COVID 19.

DISCUSSION

Le psoriasis est une dermatose érythémato-squameuse, d’évolution chronique récidivante, caractérisé par un renouvellement épidermique accéléré avec hyperprolifération et troubles de la différenciation des kératinocytes. Il existe des facteurs étiologiques du psoriasis à savoir les facteurs d’environnement (stress, climat, traumatisme), les médicaments (sels de lithium, les bêtabloquants, les inhibiteurs de l’enzyme de conversion de l’angiotensine, l’interféron, les antipaludéens de synthèse), les facteurs psychologiques (chocs émotifs, traumatismes affectifs), les facteurs infectieux (infections ORL, infection au VIH) mais aussi l’alcool, le tabac et la surcharge pondérale. Le traitement est fonction de l’étendue de la maladie et est local (dermocorticoïde, dérivée de la vitamine A, Photothérapie UVA/UVB) et/ou systémique (rétinoïdes, immunosuppresseurs, biothérapies) [12].

La physiopathologie du psoriasis s’explique par une cascade de réactions chimiques entrainant la production de plusieurs dizaines de cytokines pro-inflammatoires (TNFa, l’IL-17 et l’IL-23) et de chimiokines par les kératinocytes, les cellules dendritiques et les lymphocytes T. Un tel phénomène est qualifié de “ tempête de Cytokines ” [13]. Cette tempête cytokinique est aussi observée chez les patients souffrant de COVID-19 et ayant une atteinte pulmonaire sévère. Chez ces derniers, on observe une augmentation extrême des cytokines inflammatoires dont l’IL-2, IL-7, IL-10, IL-6 GCSF, IP10, MCP1, MIPI A et TNFa [8].

Au vu de ces similitudes immunologiques, on pourrait dire que les cytokines produites lors de l’infection à coronavirus agiraient sur les kératinocytes des patients présentant une dermatose inflammatoire chronique comme le psoriasis et induiraient de ce fait une poussée de la maladie. Ce qui reviendrait à considérer l’infection à COVID-19 comme facteur favorisant du psoriasis. Cette stimulation immunologique a déjà été évoqué pour expliquer certaines manifestions cutanées observes au cours du COVID-19 notamment l’urticaire [7].

Le COVID-19 étant une affection virale récente, de nouvelles manifestations cutanées et des interactions avec les dermatoses chroniques préexistantes sont décrites au fur à mesure de l’avancé de la pandémie [10,11]. Au vu de tout ceci le cas de notre patient nous amène à évoquer 3 hypothèses : (i) – soit le COVID-19 pourrait être un facteur déclenchant de sa poussée de psoriasis ; (ii) – soit le traitement immunosuppresseur (Méthotrexate) reçu et son âge avancé auraient favorisés sa contamination et la manifestation de la maladie à Coronavirus 19 ; (iii) – soit les patients souffrant de psoriasis seraient peut-être plus vulnérables au COVID-19.

CONCLUSION

Nous avons rapporté un cas particulier de COVID-19 révélé par une poussée de psoriasis. Sur le plan physiopathologique, les similitudes immunologiques entre ces deux pathologies nous font penser que l’infection à COVID-19 aurait joué un rôle dans le déclenchement de la poussée.

Les dermatologues devraient rechercher systématiquement les symptômes du COVID-19 chez tous leurs patients ; ceci afin non seulement de prévenir la transmission/propagation de cette pandémie mais aussi de comprendre cette nouvelle maladie.

CONSENT

The examination of the patient was conducted according to the principles of the Declaration of Helsinki.

The authors certify that they have obtained all appropriate patient consent forms, in which the patients gave their consent for images and other clinical information to be included in the journal. The patients understand that their names and initials will not be published and due effort will be made to conceal their identity, but that anonymity cannot be guaranteed.

RÉFÉRENCES

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2. Kin N, Vabret A. Les infections àcoronavirus humains. Rev Francoph Lab. 2016;2016:25-33.

3. BBC news Afrique [En ligne].C2020 [Consultéle 21/08/2020]. Le Cameroun confirme son premier cas de coronavirus. Disponible sur :https://www.bbc.com/afrique/region-51767655

4. Google actualités, [En ligne].C2020 [Consulté03/06/2020].Coronavirus (COVID19) :Cameroun. Disponible sur :https://news.google.com/covid19/map?hl=fr&amp;mid=%2Fm%2F01nln&amp;gl=FR&amp;ceid=FR%3Afr

5. Hedou M, Carsuzaa F, Chary E, Hainaut E, Cazenave-Roblot F, Masson Regnault M. Comment on “cutaneous manifestations in COVID-19:A first perspective “by Recalcati S. J Eur Acad Dermatol Venereol. 2020;34:e299-e300.

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9. Gianotti R, Veraldi S, Recalcati S, Cusini M, Ghislanzoni M, Boggio F, et al. Cutaneous clinico-pathological findings in three COVID-19-positive patients observed in the metropolitan area of Milan, Italy. Acta Derm Venereol. 2020;100:adv00124.

10. Kutlu Ö, Metin A. Dermatological diseases presented before COVID-19:Are patients with psoriasis and superficial fungal infections more vulnerable to the COVID-19?Dermatol Ther. 2020;e13509.

11. Mohamed L Elsaie, Eman A Youssef, Hesham A Nada. Herpes zoster might be an indicator for latent COVID 19 infection. Dermatol Ther. 2020;e13666.

12. CEDEF. Psoriasis. Ann Dermatol Vénérol. 2015;42:S73-S82.

13. Nicolas J-F. Psoriasis :physiopathologie. Comment l’épithélium peut orienter la réponse immunitaire ou un “ménage trois “:épithélium, cellule dendritique et lymphocyte. T Bull Acad Natle Méd. 2014;198 17-30.

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